Correspondances
Juillet 2016.
Je n'y arrive pas. J'ai bien pourtant essayé, mais c'est comme si quelque chose m'en empêchait.
Une fois, j'ai pris le taureau par les cornes comme on dit. Mais j'ai échoué et tu ne m'as pas aidé.
Pourquoi?
Pourquoi toi non plus, tu n'y arrives pas? Il me semble bien pourtant qu'avant tu n'étais pas comme ça...
C'est comme si je ne te reconnaissais plus, comme si ce n'était pas toi, ce n'était plus toi.
Toi, ma maman.
Cela fait-il longtemps que ce n'est plus pareil entre toi et moi?
Depuis quand?
Depuis combien de temps?
Moi, je n'saurai le dire.
Je me souviens seulement de la dernière fois où tu m'as consolée. Tu m'as prise dans tes bras. J'ai beaucoup pleuré. Je me suis sentie si bien à ce moment-là. Cela remonte à tellement longtemps maintenant.
J'étais enceinte et j'avais peur. Pas peur d'être maman mais de cet avenir qui était en train de devenir incertain.
On a beau tout prévoir la vie nous réserve toujours des surprises: bonnes, et mauvaises parfois.
L'écriture est MAGIQUE.
Depuis si longtemps je devais le faire. Je savais que je devais t'écrire. Pourtant ce n'est pas de cela dont je voulais te parler. Je suis en train de réaliser que je n'étais pas prête alors. Peut-être qu'au fond de moi je savais que nos problèmes étaient bien plus profonds que je ne voulais le reconnaître.
Et c'est sans nul doute pour cette raison que nous n'arrivons plus à nous parler. Que je n'arrive plus à te dire toutes ces choses.
Je crois que c'est depuis la naissance d'Ilario. J'ai été blessé, tu m'as blessée. Ta réaction m'avait beaucoup attristée. Tu n'étais pas là, et surtout tu n'es pas rentrée tout de suite.
Pourquoi? Oui pourquoi tu as fait ça?
Ta présence m'a manquée. Elle nous a beaucoup manqué.
Peut-être est-ce depuis ce temps-là? Mais je n'en suis pas si certaine que cela.
Crois-tu qu'il soit impossible de conserver une relation: mère-enfant, une fois que l'enfant devient grand?
Enfin bref, tu es ma maman et en ce moment je m'inquiète beaucoup pour toi.
C'est vrai: je ne te reconnais plus vraiment. Certaines de tes pensées ne me semblent pas venir de toi.
Tu tiens des propos qui ne me semblent pas fondés sur la raison.
SES intuitions pourtant m'interpellent tout comme toi. Mais je pense que seules ses intuitions sont justes. Les conclusions qu'il en tire ne sont pas vrai pour moi. Elles répondent toujours à une obsession qui n'est pas la tienne d'ailleurs.
Nous ne vivons pas dans un monde où le mal domine, ni même dans un monde où le diable existe.
Si le mal arrive ce n'est pas, à mon avis, la volonté d'un soit-disant diable. Je pense que c'est la faute de la vie, parfois de l'homme qui est si souvent égoïste. C'est malheureusement son tempérament qui le pousse à agir ainsi. Mais je reste persuadé que ce n'est pas la faute du Diable. C'est d'ailleurs bien trop facile de penser cela, car dans ce cas l'homme n'est plus responsable de ses actes!
Tu ne peux pas me dire que tu n'as jamais pensé comme moi?
C'est toi qui m'as élevé, toi et papa qui m'avez permis de me créer ma propre vision du monde.
Il faut arrêter de voir le mal partout; de tout interpréter et de LE laisser tout surinterpréter. De croire que tout est prémédité.
Car la vie est insaisissable.
Tu le sais bien.
Elle est comme cela.
Personne ne peut y échapper.
Bien sûr, il existe certains complots. Que nous sommes manipulés.
Mais finalement pas plus aujourd'hui même si nous vivons dans une société de communication. Car avant on utilisait la peur. On faisait croire au peuple que l'enfer existait que le diable (justement celui-là) utilisait son pouvoir de séduction et de tentation sur eux.
Ce dont je suis certaine c'est que tout n'est pas sous contrôle.
Loin de là!!!
Je pense d'ailleurs qu'il serait absolument impossible de tout contrôler!
Une intuition reste une intuition. Et il est difficile de la vérifier. Pour cela, il faut suivre les règles du LOGOS: Thèse, Antithèse et Synthèse. Mais toute thèse peut devenir une antithèse, et toute antithèse une thèse...
Or c'est ce qu'IL ne fait pas. IL n'utilise pas la raison pour tirer des conclusions. IL se laisse toujours guider par SES intuitions. C'est d'ailleurs pour cette raison que SES pensées me semblent dangereuses. J'ai l'impression qu'IL ne cherche jamais l'antithèse à ses propos.
La vie n'est pas toute noire ou toute blanche; elle est faite d'un mélange de noir et de blanc.
Et les Hommes ne sont pas tous mal ou tout bien, ils sont un subtil mélange des deux.
Ce qui m'inquiète beaucoup, c'est qu'il soit impossible de discuter, de partager des idées avec LUI. Dès qu'elles ne correspondent pas à ses croyances: ils s'énervent. IL ne supporte pas d'échanger avec des gens qui ne pensent pas comme LUI.
IL sait, LUI IL sait mieux.
Or il est comme tout le monde: il a parfois raison mais parfois tort aussi.
Je pense d'ailleurs qu'IL croit plus qu'IL ne pense.
Maman, il faut toujours se méfier de cette pensée unique (et stérile). Maman ne fait pas comme LUI. Ne te renferme pas sur SES croyances. Même si elles te semblent justes, gardes ton esprit et ton coeur ouvert comme tu l'as toujours fait. N'oublies pas que tout n'est pas sous contrôle.
IL m'inquiète.
Par exemple, de quel droit juge-t-IL les dessins de mon fils?
Est-IL expert en dessin infantile?
A-t-IL suivi une formation pour cela?
Connaît-IL les mécanismes évolutifs d'un enfant?
Peut-être a-t-IL fait des recherches sur internet, mais cela est insuffisant pour lui permettre d'analyser avec justesse la psychologie d'un enfant qui est bien trop complexe! Encore une fois, IL croit ce qu'IL voit et IL le surinterpréte car IL ne se pose pas les bonnes questions: Thèse, Antithèse, Synthèse. En fait comme chaque fois, IL va dans le sens de ses obsessions.
C'est dangereux!
J'ai un autre exemple à te soumettre. Il démontre à quel point tu as changé. Et pourquoi je ne te reconnais plus et je ne te comprends plus:
Comment as-tu pu le laisser raconter ces choses à ton petit-fils?
Comment toi, qui as été ma maman, as-tu pu accepter ce discours-là?
Je te l'ai dit je ne crois pas à ses histoires, à SON satané diable. Et je ne m'explique pas que tu puisses y croire d'ailleurs. Cela me semble si éloigner de toi. Mais ce qui m'a encore plus surprise c'est que tu L'aies laissé le raconter à Hugo.
Que LUI ait pu penser le rassurer, je le conçois. Mais pas toi! C'est impossible. Tu n'as pas réfléchi avec ta pensée. Tu te laisses complètement manipuler par SES obsessions.
Même si aujourd'hui tu crois à tout cela, penses-tu vraiment que ce discourt allait répondre aux questions d'un petit garçon de 5 ans?
Pensais-tu vraiment que vous alliez le rassurer?
Toi en tant que maman, si tu raisonnes comme une maman: imagine que quelqu'un ait raconté à ton fils de 5 ans qu'il ne doit pas s'inquiéter , que s'il a des pensées de mort ce n'est pas de sa faute mais celle du diable. Le DIABLE tout de même, on n'est plus au Moyen Age!
C'est horrible. Cela suppose que ce diable est surpuissant, qu'il est partout puisqu'il arrive même à rentrer dans sa tête et à prendre possession de son esprit!!!!
Avec SES obsessions et SES surinterprétations vous ne vous êtes même pas interrogés sur le pourquoi de ses pensées et ses questions.
Moi je l'ai fait, mais je ne suis pas allée puiser mes informations sur internet; j'en ai parlé avec une personne compétente.
Sache que les pensées de Hugo sont naturelles et qu'elles sont liées à une évolution psychologique saine!
Tu vois, à vouloir tout lier à SES obsessions, IL surinterprète et IL te fait oublier le principal: Thèse, Antithèse, Synthèse.
Ce que vous avez pu lui dire c'est totalement démentiel car votre discourt était dangereux. Hugo a tellement peur de tout ce qui est impalpable. Vous l'avez angoissé avec vos idées délirantes alors qu'il cherchait juste des réponses simples sur la mort. Vous êtes les adultes, vous étiez censés rassurer ce petit garçon de 5 ans: mon fils et ton petit-fils.
Or c'est tout l'inverse que vous avez fait avec vos croyances et SES obsessions.
Ce qui me semble encore plus incroyable c'est que tu n'as même pas pris conscience de ce que tu as fait. Malgré mes reproches, tu ne sembles pas avoir pris la mesure de tes actes face à ton petit-fils.
Tu ne vois donc plus rien? Tu ne vois donc plus ce qui est juste de ce qui ne l'est pas?
Je commence à avoir peur de toi aussi maintenant. Avant, je me disais; « même s'il est un peu étrange, maman est là ». Mais maintenant c'est tellement différent, j'ai peur de ce que tu penses toi aussi.
J'ai peur pour mes enfants lorsqu'ils sont avec vous.
Et j'ai peur pour toi aussi.
Je ne comprends pas ce que cet homme, la relation que tu as avec cet homme est en train de te faire devenir.
Et j'ai peur pour toi.
Peut-être ai-je l'ai en colère.
Mais en réalité ce n'est pas ce que je ressens et ce n'est pas ce qui m'a poussé à écrire.
Je suis plus inquiète qu'en colère, car je ne comprends pas ce qui t'arrive. C'est comme si tu étais prisonnière de SES pensées. Comme s'IL te possédait.i...
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10 mai 2017
Je n'accepte pas. Ou bien je ne veux pas l'accepter. J'ai peur. J'ai peur de ce qu'il va se passer.
Je sais que cette fois-ci ce sera vraiment différent. Et moi, je ne veux pas de cette différence. Je n'en veux pas. Je la refuse. Je suis peut-être égoïste. Mais je ne veux pas.
Je sens que ce sera la fin.
La fin de tout...
Florian est parti très loin mais ce n'est pas pareil.
Papa s'est remarié mais ce n'est pas pareil non plus.
Mamie est partie aussi, et cette fois-ci déjà : c'est la même chose. L'éloignement physique, c'est une séparation. Bien pire que ce que je n'aurais pu imaginer.
Cette séparation physique est bien pire que ce que nous avions amorcé avec l'arrivée de cet homme. Cette fois tu seras loin.
J'ai déjà tant de mal à te dire les choses. Je n'y arrive plus et je sais que lorsque tu seras partie ce sera vraiment fini. Car plus rien ne nous rapprochera. Je sais aussi qu'il fera tout pour t'éloigner de moi et de nous.
Nous sommes sa menace.
Je ne peux pas te dire pourquoi mais je le sais, j'en ai l'intime conviction. Je le sens au fond de moi.
Il me semble que je sois la seule de tes enfants à ressentir cela. Est-ce dû à notre relation? A cette relation, à ce qu'elle est devenue?
Est-ce toi qui as changé? Est-ce moi? Est-ce nous deux? Je ne sais plus.
Ce que je sais, c'est que tu t'en vas loin de moi. De ma famille. De mes enfants. De ta famille aussi!
Et je ne comprends pas. Je ne veux pas comprendre pourquoi tu fais ça? Je refuse de comprendre.
C'est vraiment la fin.
Mais ce n'est pas possible. Ce n'est pas imaginable pour moi. Ce n'est pas comme cela que ça devait se passer.
Toi, tu penses que ce sera possible. Mais tu te trompes ou bien tu ne veux pas voir, pas comprendre. Tu fermes les yeux sur ce qui va vraiment se produire. Et lorsque tu réagiras, lorsque tu comprendras (si tu comprends un jour) : il sera trop tard.
Je le sais, je le sens.
Je ne peux pas croire que tu ne comprennes pas.
Tu veux faire ce qu'il te plaît. Penser à toi.
Est-ce moi ou toi qui est égoïste? Je ne sais pas.
Ma maman, je t'aime fort même si tu ne le vois pas. Même si je ne le dis pas.
Mais ton départ, c'est comme la fin d'une histoire.
Je ne pensais pas que cela soit possible. Mais je le sais, je le sens. Lorsque tu seras partie tout sera fini...
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22 février 2018
Je vais t'envoyer la lettre que je t'avais préparée il y a deux ans.
Je l'avais faite lire à Jennifer et Florian. Mais mon frère m'avait déconseillé de te l'envoyer. Il l'avait trouvé trop agressive et il pensait que tu te serais vexé...
Mais finalement, il y a eu ce nouvel incident, après Noël, tu nous as annoncés que tu allais vendre la maison et partir vivre vers Lisieux. Avec Jennifer on a essayé de t'expliquer ce qu'on en pensait. Mais cela nous a juste permis de t'exprimer notre inquiétude car ta décision était déjà prise.
Aujourd'hui, il y a cette nouvelle lettre.
Elle me semble nécessaire. Seul, je n'arrive pas à te parler. En fait, je n'y arrive plus car j'ai l'impression (avéré à Noël) que cela ne sert absolument à rien. Alors j'ai l'espoir qu'une lettre pourra te faire réfléchir ?
Cette fois-ci, il s'agit de ta santé et je suis à nouveau très inquiète.
Pourquoi ne manges-tu pas normalement ? Pourquoi suis-tu ce régime alimentaire trouvé sur internet?
Tu as perdu tellement de poids...
Lorsque j'étais à l'hôpital tu es venue me voir. Tu m'avais apporté un jus frais et des légumes crus : « bienfaits régénérants » d'après ton gourou d'internet. À ce moment-là, j'étais totalement dépourvue. J'étais prête à tout essayer du moment que cela m'aide à sortir de cet enfer !
Mais lorsque je suis rentrée à la maison, je me suis renseignée sur ce « Casasnovas », il m'a fait peur. Son physique est vraiment effrayant : je n'ai même pas pu regarder une seule vidéo !
Je comprends tout à fait que l'on puisse suivre son régime crudivore lorsqu'on est malade et qu'on a déjà eu l'impression d'avoir tout essayé !
Mais toi, pourquoi ?
Tu n'es pas malade, ou du moins tu ne l'étais pas lorsque tu as commencé...
Tu te prives de tous les bonheurs que la vie pourrait t'offrir !
Quel plaisir trouves-tu à faire cela ? On dirait que tu te punis, que tu te punis de vivre ?
En plus, à ton âge : cesser du jour au lendemain de manger « normalement ». C'est totalement inconscient !
Tu ne te rends pas compte qu'en cinquante ans ton corps a pris des habitudes. C'est une machine : si tu changes le carburant d'une voiture et bien elle va tomber en panne ! En fait, ton corps te dit « stop » ! ! Arrête !
« C'est juste un manque de fer ! », voilà ce que tu nous réponds lorsqu'on te demande d'aller voir un vrai médecin.
Je ne comprends pas ce que tu cherches à faire ? Sauf si tu es était déjà malade et que tu nous ne nous avait rien dit ?
Et puis autre chose, tu nous réponds : « Il ne faut pas tout croire ce que l'on écrit sur Casasnovas! ». Eh bien justement, il faut t'informer sur ce que ses détracteurs ont à lui reprocher ; pour pouvoir te faire une idée juste sur lui.
Tu as dit que grâce au régime crudivore la grosseur que tu avais sur la poitrine a disparu. Elle est partie parce que tu y croyais tellement que ton esprit a soigné ton corps. Je suis sûre que cela n'a rien à voir avec ce que tu as mangé !
Jennifer a raison. Tu vois on te l'avait dit : tu es partie si loin. Lorsque tu es malade on n'est pas présentes pour t'aider. On ne peut pas venir te voir rapidement. Quelle idée tu as eu de partir si loin ?
Comme Ilario l'a dit lorsqu'on arrivait chez toi : il y a la campagne et la forêt aussi à côté de chez nous ??
En vérité, qu'as-tu fuis ?
Te rends-tu compte, de l'état dans lequel tu es en train de te mettre ?
Tu ne te nourris pas bien, et pour moi, c'est pour cette raison que tu as perdu tout ce poids et que tu ne te sens pas bien ; si fatiguée...
Crois-tu que ce soit normal d'être aussi fatigué ? Et pose-toi la question : à quoi est due ton manque de fer ?
Peut-être rien à voir avec le déménagement...
Arrête d'écouter les conseils de ton Casasnovas ! Ça ressemble vraiment à une secte et lui au gourou : tu n'écoutes plus que ses conseils.
Dès que quelqu'un ose dire ou faire des remarques sur lui, ses pratiques ou les croyances qu'il prodigue, tu refuses d'en parler ou bien tu t'énerves...
Tu deviens comme Philippe : impulsive. On ne peut plus parler avec toi. Tu te braques complètement.
Tu es parti t'isoler dans le fin fond de la France toute seule, loin de ta famille, de tes amis ? ? Pourquoi ? Est-ce parce que c'est ce qu'il préconise ?
Tu es complètement conditionnée par ce type et Philippe ! C'est inquiétant car il s'agit de deux personnes paranoïaques. Dangereuses pour toi!
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7 avril 2018, le matin
Ce matin, je me suis demandé finalement si tu n'avais pas toi aussi un petit côté paranoïaque; ce qui expliquerait bien des choses...
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7 avril 2018, le soir
Je suis tétanisée.
Il n'y a pas d'autres mots pour nommer ce que je ressens.
Au fond de moi, je sens que c'est très grave. Lorsque je mets bout-à-bout, tout ce que je sais et tout ce que j'apprends au fur et à mesure : je suis extrêmement pessimiste...
J'ai le sentiment, le ressentiment que ma maman a un cancer généralisé et qu'elle en est au stade terminal.
Elle a tellement attendu pour se faire diagnostiquer. Elle a tellement attendu pour se faire soigner.
Sylvie, sa cousine, nous a prévenu qu'elle était dans un état de dégradation physique, qui fait peur à voir.
Je pense qu'il est déjà trop tard. C'est quelque chose qui est horrible à dire et pourtant je le ressens...
Hier matin, lorsque j'ai reçu ton message téléphonique et ensuite lorsque je t'ai parlé ; les uniques mots que j'ai pu enregistrer étaient: « cancer du sein ». Parce que depuis tellement de temps je redoutais ce moment. C'est comme si je savais qu'on y arriverait un jour prochain.
Et je n'arrive pas à pleurer, moi qui pleure temps : rien ne sort.
Ce que je ressens est très paradoxal, c'est comme si je savais ce qui va se passer. Mais en même temps ce n'est pas concret pour moi. C'est juste des mots pour l'instant. Ça reste des mots puisque rien n'est certain, même pour le cancer du sein.
Lorsque j'analyse mon ressenti présent, avec celui éprouvé lorsque j'ai appris pour le cancer du sein de ma grand-mère, c'était pareil. C'est-à-dire que j'étais tétanisée aussi à l'idée de la perdre, de savoir qu'elle allait souffrir le martyre à plus de 70 ans. Et pourtant, elle est toujours en vie. Elle est loin, elle aussi, mais elle est toujours en vie !
Hier, finalement, le soir, je n'ai plus voulu appeler ; je crois que je n'ai pas envie de savoir : j'ai peur. Et je n'ai pas envie de la voir non plus car je sais que le choc va être violent. J'ai peur que cela devienne concret : pour l'instant ça fait quatre mois que je ne l'ai pas revu et c'est très bien comme ça. Même si je sais qu'elle s'est dégradée physiquement je ne l'ai pas vu...
Je crois qu'elle pense aussi que c'est la fin ; et c'est peut-être pour cette raison que je le ressens.
Peut-être que je regretterai un jour de ne pas être allé la voir : cela fait quatre mois que ça ne va pas bien et ... c'est comme si dans un sens, je voulais la punir d'être parti si loin de moi, de nous.
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14 avril 2018
C'est fini.
C'est fini.
C'est fini.
Je ne pleure pas ou presque rien.
Je n'ai pas envie de pleurer. Je ne veux pas pleurer. Peut-être, que tant que je ne pleure pas, ça ne sera pas vrai.
Peut-être que si je ne pleure pas : c'est que je ne veux pas accepter. Comme maman, je ne veux pas : je suis dans le déni.
Je refuse que ce soit vrai ! Je n'ai pas envie de pleurer parce que quand je vais pleurer tout deviendra réel.
Je ne veux pas croire cela.
Je suis triste pour mon frère qui ne la reverra pas en vie. Je suis triste pour mes enfants parce qu'elle ne les verra pas grandir.
Mais je ne veux pas être triste pour moi. J'ai peur que ça me fasse trop de mal.
Et puis je suis en colère que ce soit arrivé aujourd'hui. Pas après elle, non pas après elle. Mais après je-ne-sais-quoi, je ne sais qui. Qui n'a pas attendu encore quelque temps. Un tout petit peu plus de temps.
Je ne voulais pas annuler ma fête d'anniversaire parce que je voulais garder l'illusion que tout était normal, que rien ne s'était passé. Que ce coup de téléphone n'avait pas existé. Juste à temps, juste un jour, juste un moment.
Je ne veux pas y penser et pourtant je n'ai fait qu'en parler. toute la journée. Et puis tout a été gâchée : j'ai dû disparaître plusieurs heures, occupé par les papiers.
Je voudrais garder l'illusion jusqu'à demain. Jusqu'au dernier moment.
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6 juin 2018
Ma maman, j'ai passé la journée d'aujourd'hui à écrire une lettre pour dénoncer Philippe.
Je ne pense pas que cela t'aurait plu et pourtant je l'ai fait quand même.
Ce n'est pas pour t'embêter ou pour lui nuire ; du moins je ne le pense pas.
Je l'ai fait pour te prouver mon amour. Pour que tu comprennes, si tu es encore présente quelque part que je t'aimais que je t'aime toujours. Que mon amour pour toi était totalement désintéressé mais aussi que nos méfiances étaient justifiées. Même s'il est trop tard puisque tu n'es plus là. J'ai besoin de le faire.
Peut-être que j'en ai besoin pour faire mon deuil, pour accepter ce qui t'est arrivé.
Il y avait tellement de questions en suspens lorsque tu es décédée. Personne ne comprenait rien à ce qu'il s'était passé. Ce qu'il t'était arrivé. Aujourd'hui, je crois que j'ai répondu à beaucoup de ces questions. Après toutes ces recherches et réflexions que j'ai pu entreprendre.
Peut-être que ces réponses ne sont pas justes mais c'est les seules que j'ai pu trouver et les seules peut-être que je suis capable d'accepter et de comprendre à ce jour.
Elles me rassurent sur qui tu étais vraiment.
Toutes les personnes saines d'esprit que j'ai pu rencontrer avaient les mêmes questions que moi : pourquoi ? Pourquoi as-tu fait ça ? Elles se posaient la même question que je t'avais posé alors à l'hôpital : qu'est-ce que tu as fait ?
Et comme moi, elle n'avait pas de réponse ou une seule... Qu'elles n'osaient pas formuler d'ailleurs. Que t'as fait cet homme pour que tu changes à ce point-là ? Pour qu'on ne reconnaisse plus celle que nous avions connue pendant toutes ces longues années. Que s'est ou s'était-il passé ?
Peut-être que comme ma marraine, Sylvie, me l'a dit nous aurions dû être plus présents. Ne pas lui laisser libre la place qu'il convoitait tant pour t'avoir à lui tout seul.
Moi, j'ai avant tout pensé à me protéger : à protéger mes enfants.
Tout était devenu tellement bizarre chez toi lorsqu'il était là. Je ne pouvais plus venir te voir.
Je ne le pouvais plus.
J'avais peur de ce qu'il allait dire. Comment devrais-je réagir face à ses propos cohérents et pourtant si insensés. Et comment allais-je faire pour préserver mes enfants de toutes ces idées qu'il prônait ?
Ce que j'ai fait : m'éloigner de toi ; je ne pouvais pas faire autrement !
Avais-je peur de me mettre en colère et de te perdre complètement? Ou peut-être que j'avais peur aussi de te voir à nouveau réagir comme tu l'avais déjà fait à de nombreuses reprises : ne rien faire, ne rien dire et le laisser nous insulter...
Avais-tu peur de ses colères ? Des violences dont il était capable ? Tu préférais peut-être te taire pour nous protéger, ou pour ne pas qu'on découvre qui il était réellement ?
Toutes ces questions restent finalement en suspens car tu n'es plus là pour y répondre. C'est vrai, et celles que je vais choisir ne sont peut-être pas les tiennes. En tout cas, elles sont celles que j'ai besoin d'entendre pour réussir à te comprendre et à accepter ce qui t'est arrivé.
Je sais pourquoi ton cancer s'est déclaré : parce qu'on ne voulait plus LE voir. Je le sais. Et j'en suis consciente depuis longtemps. Mais, même si cela a causé ta mort, je n'arrive pas à regretter ce choix.
J'ai protégé mes enfants de cet homme. Cet homme si dangereux qu'il a causé ta mort. Donc je ne peux pas regretter mon choix. Car ils auraient pu te tuer et détruire aussi mes enfants. Toi, tu étais une grande personne. Tu étais ma maman : tu étais donc une personne réfléchie. Pas mes enfants...
Jamais, je n'aurais imaginé, même si le doute en te voyant changer m'avait envahi à de mainte reprise, qu'on en arriverait là. Parce qu'on ne voit ça que dans les fictions.
Jamais on ne t'a demandé de choisir.
Jamais nous n'aurions osé. Nous avions bien trop de respect pour ta vie privée. Car c'est comme cela que tu nous as élevé.
Finalement peut-être que nous aurions dû te demander de choisir et que cela t'aurait sauvé. Mais je n'y crois pas. J'aurais tellement eu peur que tu sois malheureuse. En vie mais malheureuse, à quoi bon ? Et peut-être que le cancer se serait déclaré tout de même...
Je me souviens d'une fois, tu étais passé nous voir un dimanche après-midi, et Martial, curieux comme il est, t'avais demandé : « Et comment va Philippe ? ». Car nous ne t'entendions plus parler de lui. Cette fois-ci, la seule à m'en souvenir, tu avais expliqué qu'il n'était pas facile et qu'un peu de distance ça faisait du bien.
Je regrette car c'est à ce moment-là que nous aurions dû être plus présents pour le distancer et l'éliminer de ta vie. Car à ce moment-là, tu étais encore lucide et tu n'étais pas sous son emprise...
Je regrette mais en fait à ce moment précis je n'avais pas conscience de ce qui allait se passer.
Je l'ai toujours trouvé étrange mais comme tu ne me disais rien sur lui je n'avais rien de concret à lui reprocher. À cette époque-là, il ne s'était pas encore dévoilé sous son vrai jour: aucune dispute, aucune insulte et propos divaguant n'étaient sortis de sa bouche et de son esprit malade. Donc ce que je ressentais n'était que des ressentis, une intuition, seulement.
Seulement, si j'avais su...
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18 juin 2018
Je t'en ai tellement voulu...
Je m'en veux tellement de ne pas avoir compris ce dont tu avais besoin. De ne pas avoir vu ta souffrance.
Aujourd'hui, c'est moi qui souffre...
Tu as refusé de nous écouter. Tu ne voulais pas entendre ce qu'on te disait. Tu as préféré suivre c'est homme étrange, c'est être dérangé.
Je savais pourtant, je sentais bien que quelque chose n'allait pas mais ma colère m'a empêchée de venir te voir. Je n'ai pas l'impression que ce soit ma fierté. J'ai vraiment le sentiment que c'est ma colère, celle que je ressentais contre ton choix, ce choix que je ne comprenais pas. Et peut-être que je ne comprends toujours pas.
Pourtant c'est comme ça. C'est fini. C'est bel et bien fini. Je n'y peux plus rien. Car tu n'es plus là, tu es parti à jamais et pour toujours.
Je ne sais pas ce qui me rend le plus triste vraiment, sincèrement. Je ne le sais pas : peut-être que tu ne sois plus en vie ?
Je n'ai vraiment pas l'impression que tu me manques.
C'est comme s'il n'y avait plus de relation, je veux dire de vraie relation entre nous. Et cela me faisait mal et me fait toujours du mal. Celle que tu étais devenue ; la relation qui était la nôtre depuis quelques années maintenant ne me manque pas.
Je me souviens m'être aperçue que depuis quelques années, je ne te demandais plus comment tu allais, ce que tu faisais. Tu ne parlais que de moi. Ta vie m'effrayait. Je n'avais pas envie d'entendre tes histoires.
Je ne peux pas me rappeler depuis quand mais ce qui est certain c'est que cela faisait longtemps.
Encore, aujourd'hui, je suis incapable de dire que tu me manques et que je suis triste parce qu'il y a un vide en moi : le tien.
Car je crois que ta place était vide dans mon cœur depuis si longtemps... On faisait ensemble : toi et moi. On jouait un jeu, un rôle. Quelque chose avait été cassé entre nous.
La maman que j'aimais, celle qui m'a élevée, m'a inculqué mes valeurs, m'a donné tant de liberté, je ne la reconnaissais plus.
Je ne me souviens pas que tu aies jamais été très démonstratrice en amour. Mais celui que tu m'as donné c'était ton ouverture d'esprit, et la liberté que tu m'as offerte. La liberté de mes choix. La confiance que tu nous donnais, c'était ta preuve d'amour.
Je ne sais pas ce qui me dérange vraiment dans tes choix de vie. Peut-être tous ces hommes que tu nous as présentés et qui ne te méritaient pas. Tu étais quelqu'un de merveilleux. Et tu ne devais pas le croire pour toujours te retrouver avec des losers.
C'est peut-être à cause de ce qu'était devenue ma relation avec toi que je n'arrive pas à faire mon deuil.
Ce qui me rend très triste c'est de ne pas avoir compris que tu avais besoin de notre amour. Je ne le savais pas. Parce que je pense que j'aurais pu te le donner : l'amour.
J'espère que tu as vu et compris que je t'aimais. Parce que même si je ne te le montrais pas, je t'aime très fort pour tout ce que tu as fait pour moi. Pour tout ce que tu as fait de moi. Celle que je suis. Peut-être imparfaite mais sincère et honnête. Et je suis fière d'être celle que je suis grâce à toi, à ton éducation. Je n'ai pas pu te le dire mais j'espère si fort que tu l'aies entendu.
J'ai le sentiment que tu es morte cette nuit-là (le samedi), parce que tu n'allais pas avoir de visite à l'hôpital jusqu'au mardi. Jamais je n'aurais imaginé que ça allait te faire mourir. Sinon tu penses bien que je serais venue te voir.
Jamais au grand jamais je n'ai imaginé que tu allais partir si vite.
Je l'avoue, j'ai été égoïste, je voulais fêter mes 40 ans. C'est bizarre moi qui ai toujours pensé aux autres avant moi ; cette fois-ci...
Et j'ai impression que je t'ai tué.
Je savais que c'était grave ; bien plus que ce que tu me disais mais comme toi j'étais dans le déni. Parce que comme toi j'avais besoin d'espérer.
La vie c'est si peu de choses. On s'emmerde tellement pour finir dans un trou à quelques mètres sous terre. Pourquoi on s'emmerde, à quoi bon ? À quoi ça sert toute cette mascarade ?
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24 juin 2018
C'est terrible parce que lorsque je relis ce que j'ai écrit, c'est comme si je savais tout, comme si j'avais tout compris.
Et pourtant c'est aussi comme si je n'avais rien fait.
Pourquoi ?
Pour mon père lorsque j'ai été très en colère, je n'ai rien demandé à mon frère et ma sœur ; du moins je ne m'en souviens plus : j'ai envoyé une lettre à Catherine. Et pour ma maman, non !
Pourquoi ? Pourquoi je l'ai écouté ?
La seule réponse que je suis capable de donner pour expliquer cela, c'est que j'avais peur de te perdre encore plus que je ne t'avais déjà perdu.
Comme si après la lettre, cela (notre relation) aurait été encore pire...
Je n'avais plus confiance en toi.
D'ailleurs, je n'ai même pas pensé à lui écrire, à lui. Jamais, à aucun moment !
Avec toi et lui, je savais et ressentais sans doute que c'était impossible. Que la situation était insoluble et indiscutable.
Car tu n'étais plus la même personne : tu n'étais plus ma maman. Tu étais devenu une autre, une étrangère à mes yeux que je ne comprenais plus. Et avec qui je n'arrivais même plus à discuter. Toi et moi, on faisait semblant.
C'est comme si tu étais devenue sa chose, sa chose à penser.
Quel malheur cette histoire !
J'ai beau retourner chaque situation dans ma tête ; je ne vois pas quelle aurait été la solution.
J'ai l'impression que de toute façon il était trop tard ; cela durait depuis trop d'années.
Il occupait une place trop importante dans ta vie qui ne nous permettait plus de réagir et de t'aider.
Il était bien trop présent. Bien plus que nous trois réunis. Il t'a totalement détraqué.
Il t'a manipulé à sa guise sans qu'on s'en rende compte. Et lorsqu'on a eu des soupçons ; nous n'avons pas su comment réagir ou pas fait ce qu'il aurait fallu faire.
Jennifer, elle, a réagi. Elle a été mon porte-parole et malgré tout ce qu'elle t'a dit : à aucun moment tu n'as changé d'avis. Tu ne l'as pas écouté ; tu n'as cru que lui : cet homme étrange.
Il t'a détruite, t'as réduit à une simple d'esprit devenue un capable de penser par elle-même !
Comment peut-on en arriver là?
Comment as-tu pu en arriver là ?
Par amour ? Je n'y crois pas.
Par regret, peut-être...
Tu n'aimais pas Philippe mais bien plus l'homme à qui il ressemblait, et à qui il te faisait penser : ton premier amour de jeunesse ! Nous, as-tu dit, lorsqu'on s'est vus après Noël Jennifer, toi et moi. C'est pour cela que tu es restée avec lui, parce qu'il te faisait penser à ton premier amour perdu.
C'est ça ; tu avais des regrets et tu t'es accroché à un passé fantasmé.
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13 août 2018
À vrai dire, je n'ai jamais compris pourquoi tu avais quitté papa. En fait ce n'est pas vrai, adolescente, j'avais compris les explications que tu m'avais données. Et les analyses que j'en avais faites, m'avaient permis d'accepter et de comprendre ta décision.
Mais au fil du temps, au fil de tes amants et de tes déceptions amoureuses et sentimentales, je n'ai plus compris.
Quel intérêt de quitter mon père, si c'était pour te retrouver toujours très mal accompagné ?
Tu étais incapable de vivre seule...
Pourtant, je n'ai jamais eu l'impression que tu regrettais car tu ne l'aimais plus...
Peut-être, juste le jour de son mariage. Mais ce n'était sans doute pas des regrets que tu ressentais. Plus de la jalousie, de l'envie !
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19 août 2019
En fait, jusqu'à l'arrivée de cet homme je n'avais pas remarqué qu'il y avait un véritable trouble entre elle et moi.
C'est ce que je pensais au début... Mais après avoir écrit cette correspondance mortuaire, j'ai compris que ce n'était pas vrai : j'avais oublié sciemment notre relation tumultueuse car il était beaucoup plus simple pour moi d'en vouloir à cet homme plutôt qu'à ma maman...
Est-ce que sa présence l'a accentué à tel point que le trouble est devenu insupportable ? Ou est-ce qu'il l'a juste révélé ?
Peut-être qu'en fait, il a utilisé cette faille pour manipuler ma maman et la retourner contre moi !
Enfin, à bien y réfléchir cela faisait tout de même de très nombreuses années que j'avais des choses à lui reprocher. Ou plutôt qu'elle avait commencé à se comporter différemment avec moi. Toutes ces choses je les avais enfoui dans ma mémoire pour pouvoir les oublier, les occulter.
Je pense que c'est depuis le divorce de mes parents.
Ne me portait-elle pas responsable de sa vie ? De son échec...
Il est vrai que si elle n'était pas tombée enceinte jamais elle ne se serait mariée si jeune avec mon père. Elle aurait sans doute fini ses études et peut-être rencontré quelqu'un d'autre.
Je sais qu'elle regrettait.
Lorsque j'avais une dizaine d'années, mes parents prenaient l'apéro dans le jardin de ma grand-mère, à Soilly, avec mon oncle et ma tante. Moi je jouais avec mon cousin et ma cousine un peu plus loin.
Et j'ai entendu ma mère, hausser la voix, ou s'énerver, je ne sais pas mais je l'ai entendu... Et elle parlait d'une très jeune fille enceinte. Elle a dit qu'elle, elle lui conseillerait d'avorter.
Ses paroles sont restées à jamais gravé en moi car j'avais bien senti qu'elle parlait d'elle.
Elle me hantait tellement qu'à 20 ans, alors qu'elle était en pleine
analyse, je lui ai posé la question.
Elle m'a répondu que j'étais un accident, contrairement à ce que ma tante Catherine m'avait soutenu : « tes parents m'ont toujours dit qu'ils avaient essayé pendant plusieurs mois de faire un bébé pour pouvoir vivre ensemble ! » (car ils se voyaient en cachette depuis deux ans!).
Je ne sais plus ce que ma mère m'a répondu exactement, mais ce dont je me souviens c'est que j'ai trouvé sa réponse horriblement cruelle. Elle n'a pas ajouté un mot pour me rassurer, me réconforter : m'expliquant qu'elle ne regrettait pas ma naissance.
Bref, ...
En fait, depuis que le divorce avait été consommé : séparation du lieu de résidence de mes parents. J'ai la sensation qu'elle n'a cessé de me tenir responsable du début de sa vie.
Je me souviens qu'elle sortait tellement que moi, je ne pouvais plus sortir alors que j'avais 17 ans : je devais garder mon frère et ma sœur.
Puis, alors qu'elle avait acheté sa maison à Vémars depuis un an ou deux peut-être, et que je continuais mes études à l'université ; j'ai voulu m'installer avec Martial. Je me souviens qu'elle m'a attrapé un matin et m'a fait tout un scandale.
Jamais, elle n'a parlé de mon bien-être. Ça ne l'intéressait pas de savoir si c'était une erreur de partir si jeune. Non la seule chose qui la dérangeait, c'est qu'elle n'allait plus pouvoir payer les traites de sa maison, puisque mon père n'allait plus lui verser ma part de la pension alimentaire.
Elle m'a « gentiment » rappelé que lorsqu'elle avait acheté sa maison, je lui avais promis de rester plusieurs années! Elle était vraiment hors d'elle, presque méchante parce que, pour elle, j'avais menti ! En fait, cela n'avait rien à voir, c'était juste la vie : j'étais une très jeune fille et je lui avais dit, ce que je pensais réalisable, au moment où elle m'avait posé la question.
Finalement, je suis restée car elle avait réussi à me rendre coupable. Oui, je m'en serais tellement voulu si mon frère et ma sœur avaient dû encore déménager à cause de moi ! Elle m'avait manipulé !
Et puis il y a eu mon départ en Angleterre comme fille au pair. J'avais vu mon papa et lui avait demandé, s'il pouvait me donner l'argent de la pension car je devais en avoir besoin pendant cette période. Mais il ne l'a pas fait. Je crois qu'il n'a pas osé s'opposer à ma mère. Car lorsque je lui ai posé la question à mon retour, il était très mal à l'aise et il a botté en touche : donnant une excuse bidon mais me confirmant qu'ils avaient bien versé cette somme à ma mère : 1500 Francs par mois ; soit 9000 Francs.
En apprenant ça, j'étais vraiment toute retournée. Du coup, j'ai pris mon courage à demain (car il était déjà difficile de l'affronter à cette époque pour moi). Et je lui ai demandé pourquoi elle avait gardé cet argent.
Elle n'avait pas grand-chose à dire. Pourtant, elle était hors d'elle : je l'avais pris en faute !
Elle a osé donner comme excuse qu'elle en avait besoin car ils étaient quatre à la maison. Quatre ? « oui ! » m'a-t-elle répondu : elle, mon frère, ma sœur et le copain de ma sœur (il vivait à la maison à mi-temps mais ne participer financièrement rien).
Je crois que sa réponse m'a fait devenir folle, et j'ai crié après elle.
Mon père lui donnait de l'argent uniquement pour faire vivre mon frère, ma sœur et moi ! Et en aucun cas, pour le mec de ma sœur. Lui ai-je hurlé dessus !
Et moi dans tout ça ! ?
Elle estimait sans doute, que je n'en avais pas besoin ou qu'elle le méritait plus. Elle aussi était très en colère que je lui parle sur ce ton et surtout que je la mettais face à son vol.
Elle m'avait, du coup, proposé de me rembourser ce que j'avais accepté. Mais elle ne l'a jamais fait.
Et enfin, la naissance d'Ilario : son premier petit-fils.
Tout d'abord, chose incompréhensible, elle avait prévu de partir en vacances pendant la période où je devais accoucher... Pourquoi ? N'aurait-elle pas pu décaler ? Je pense que si. Alors pourquoi avoir choisi les mêmes dates ? ?
Du coup, forcément elle n'était pas présente.
Et en plus, à l'annonce de la naissance d'Ilario, elle est tombée malade : ne lui permettant pas de venir nous voir à l'hôpital. Je crois me souvenir qu'elle est rentré une semaine plus tard : son absence nous a beaucoup peinés.
Je pense qu'à 45 ans, elle a eu du mal à accepter de devenir grand-mère... Même si finalement, après, elle a été une bonne mamie jusqu'à l'arrivée de cet homme étrange.